Suez à Dijon : bilan d’une coentreprise publique-privée pour la gestion de l’eau
Du local à l’international, la qualité comme l’avenir de l’eau suscitent l’inquiétude. L’alliance de Suez avec Dijon métropole a répondu efficacement à cet enjeu, fournissant… Cet article Suez à Dijon : bilan d’une coentreprise publique-privée pour la gestion de l’eau est apparu en premier sur Green et Vert.

Une approche commune de la question de l’eau…
En avril 2021, Les Échos rapportaient le lancement de « la première Société d'économie mixte à opération unique multiservice (Semop) pour l'eau et l'assainissement ». Nommée Odivea, cette société entendait combiner, par ce partenariat public-privé, l’expertise gestionnaire de Dijon et la capacité d’innovation et d’investissement du Groupe Suez présidée par Thierry Déau. Quatre ans plus tard, cette SEMOP qui a valu en décembre de la même année une Marianne d’Or à Dijon confirme l’adage aristotélicien selon lequel le tout vaut plus que la somme des parties. Les deux acteurs partagent en effet une vision commune articulée autour d’une transition énergétique qui profite tant aux populations qu’à l’environnement.
Dès mars 2023, Dijon métropole bénéficiait déjà de la reconnaissance de la Commission européenne comme territoire pionnier pour la décarbonation des collectivités. Avec Nantes, elle fut la seule ville française nommée par le programme « Villes Pilotes / 100 villes neutres et intelligentes pour le climat » de la plateforme NetZeroCities. Celle-ci met en lumière les villes qui implémentent des technologies de pointe et cherchent à accélérer la mise en pratique « des politiques publiques de transition écologique et énergétique ». En parallèle, la ville de Dijon est depuis 2020 membre du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI), une initiative impulsée en 1990 par le Programme des Nations unies pour l’Environnement pour déployer des projets de développement durable dans les communes.
La pertinence de l’association de Dijon métropole avec Suez pour former Odivea en découle. Outre la CDC, les deux principaux actionnaires de Suez sont des fonds d’investissement. Lancé en 2006, l’américain Global Infrastructure Partners est dirigé par Adebayo Ogunlesi et investit aussi bien dans les infrastructures énergétiques que dans la gestion des eaux usées. Il appartient désormais à BlackRock. Le second fonds derrière Suez, le français Meridiam, a été fondé par Thierry Déau, actuel président de Suez depuis le limogeage de Sabrina Soussan. Cette structure à impact certifiée B Corp a vu sa valorisation passer de 32,3 à 37,2 milliards de dollars entre 2022 et 2023. Consacrée à la construction d’infrastructures durables, Meridiam a investi plus de 85 milliards de dollars à cette fin depuis sa création en 2005. La marque et le slogan de Thierry Déau transparaissent d’ailleurs dans l’approche dont procède Odivea : « people and planet ».
… au bénéfice des usagers comme de l’environnement…
L’investissement initial de 100 millions d’euros d’Odivea prévoyait en effet de combiner le développement d’innovations pour réduire les factures d’eau des ménages tout en répondant aux préoccupations environnementales. Soit en pratique, une réalisation simultanée de plusieurs Objectifs de développement durable. L’ODD 6 prévoit par exemple un accès garanti pour tous à des services d’alimentation en eau et d’assainissement gérés de manière durable, fondement de la création d’Odivea. L’ODD 7 prescrit une énergie propre et à un coût abordable, or quatre ans après le lancement de la SEMOP, la gestion opérée par Suez a, selon la direction de Dijon, « permis de faire baisser sensiblement le prix de l’eau » : 1,59 euros / m3, et un assainissement à 1,94 euros / m3, soit un total de 3,53 euros par m3 d’eau. Ces prix sont inférieurs à la moyenne du département de la Côte d’Or, dont les montants respectifs se chiffrent à 2,12 euros pour l’eau et à 2,37 euros pour l’assainissement, soit un total de 4,46 euros par m3 d’eau.
L’action d’Odivea auprès des Dijonnais s’est déclinée sur plusieurs niveaux. Son service d’eau connectée 2.0, ON’connect est une solution de compteurs d’eau communicants. Il détecte automatiquement des fuites sur le réseau par calculs d’algorithmes ou une surconsommation d’eau par rapport à des seuils que peuvent définir les usagers. Le relevé quotidien et automatisé quant à lui, réduit les factures en s’appuyant sur la consommation réelle. Bilan au printemps 2024 : un rendement passé de 77% en 2005 à 84% sur l’ensemble de la métropole et une préservation de la ressource en eau. Sur le terrain, le rapport de développement durable 2024 de Dijon métropole expose en outre qu’au travers de l’opération Optim’eau (avec Odivea, Suez et Sogedo), 130 000 foyers ont reçu des kits de réduction d’eau « dans toutes les communes de la métropole ». Composés de mousseurs et d’un pommeau de douche avec un flexible qui permet d’économiser 30 à 40% d’eau par douche, ils appuient l’optimisation de la gestion quotidienne de l’eau par les usagers.
Le second volet d’Odivea, l’environnement, s’est également traduit par des innovations. La SEMOP a investi 15 des 20 millions d’euros nécessaires à la construction d’une unité de méthanisation des boues, devenue effective en 2023 et venue compléter une unité d’épuration de biogaz construite par Dijon métropole. L’unité de méthanisation a réduit de moitié le volume des boues – et donc le bilan carbone de son transport. Grâce à cela, les boues ont été converties en biogaz « pour couvrir l’équivalent des besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire d'environ 4 000 foyers » grâce aux 10 gigawattheures de méthane annuels produits. Les émissions de gaz à effet de serre sont réduites au bénéfice de la neutralité carbone. Dans une optique comparable, Odivea est co-délégataire depuis 2021 de l’opération Protect’eau. À ce titre, elle accompagne les industriels et d’autres acteurs économiques dans la protection des milieux naturels en préservant l’eau « des rejets de polluants toxiques ». Cet ensemble de réussites démontre d’ailleurs de manière encourageante la possibilité de répondre plus largement à des problématiques liées urgentes.
… et qui répond efficacement à l’urgence sanitaire et écologique
Un enjeu de santé a récemment fait scandale. Une étude de Nature Medicine a alerté sur les quantités « alarmantes » de microplastiques retrouvées dans nos cerveaux, en hausse de 50% « entre 2016 et 2024 », soit « l’équivalent d’une cuillère de plastique dans le cerveau », selon Fréquence Médicale. Or en 2021, Bertrand Camus, alors président de Suez, annonçait « une première mondiale » : un traitement des micropolluants et des microplastiques par Ovidea, avec 60 millions d’euros dédiés à l’assainissement sur les 100 millions d’euros composant son enveloppe. Le rapport Diagnostic Vulnérabilité de Dijon métropole publié en septembre 2024 annonçait sur ce point que la station d’épuration Eau Vitale de Dijon Longvic gérée par Odivea, « dimensionnée pour traiter les eaux usées de 400 000 équivalents logements-habitants », filtre les plastiques et déploierait dès 2028 une unité de microfiltration, en plus d’un second bassin d’orage que gère déjà Odivea pour limiter le rejet des eaux usées et la pollution de l’eau en milieu naturel. Hors-Dijon, Suez a en outre mis au point avec le CNRS un procédé de destruction des micro-polluants et de réduction des PFAS, le « plus gros investissement [du Groupe] dans l’innovation […] depuis toujours », selon le directeur de sa division eau Pierre Pauliac.
Suez et Dijon se sont également montrées proactives en adoptant des pratiques encore sous-exploitées. En amont de la Journée mondiale de l’eau, un rapport fut publié par la Global Commission on the Economics of Water (GCEW), créée en 2022 et où siègent notamment le concepteur des limites planétaires Johan Rockström, la directrice-générale de l’Organisation mondiale du Commerce, des responsables des C40 Cities, de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI), etc.. Consacré à l’économie liée à l’eau et à la valorisation du cycle hydrologique, le rapport formulait plusieurs préconisations. Certaines sont déjà pleinement intégrées avec succès aux pratiques d’Odivea : conservation et restauration des habitats naturels critiques, passage à de l’énergie propre allégeant la pression hydrique (l’usine de méthanisation déjà mentionnée), partenariat public-privé « symbiotique » pour fournir de manière efficace, juste et durable de l’eau dès le départ, ou encore utiliser les données (data) comme bases d’action – ce que fait déjà Dijon, qui a ainsi pu rapporter, pour 2023, 100 % de conformité microbiologique sur 464 bulletins d’analyses de son eau potable.
Quant aux préoccupations européennes, Odivea y répond déjà par ses initiatives : outre Protect’eau, sa station d’épuration filtrant les microplastiques et son bassin d’orage déjà cités, la SEMOP a créé à Dijon une cinquième usine de production d’eau potable (Henri Navier), traitant les eaux de source par ultrafiltration, « procédé capable de bloquer des virus et des macromolécules organiques ». Ceci, alors qu’en 2024, l’Agence européenne de l’Environnement a publié un rapport inquiétant sur l’état de l’eau au sein de l’Union européenne, analysant sa surexploitation, sa pollution et les effets néfastes du changement climatique. Nous y lisions qu’en 2021, « seules 37% des nappes d’eau de surface parvenaient à un état écologique bon ou élevé. 29% atteignaient un bon statut chimique ». En quatre ans, il apparaît donc qu’Odivea, synergie publique-privée entre Suez et Dijon, soit parvenue à remplir son cahier des charges auprès des usagers et de l’environnement. Mais aussi, à répondre dans le même temps à des enjeux touchant tant à la santé publique qu’à l’avenir de l’eau, cette ressource dont l’Agence européenne de l’Environnement précise, en conclusion de son rapport, qu’elle « n’est pas une option ».
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