En France, les prisons sont solubles dans la politique

La prison, vraiment, c’est trop pénible ! Et puis, en France, les prisons sont trop pleines, comme une boîte qui déborde. Alors un gentil rapport explique que pour faire de la place, on devrait laisser sortir un peu plus tôt certains détenus, sauf bien sûr les méchants qui ont fait des choses très très graves. Et […]

Mai 14, 2025 - 14:24
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En France, les prisons sont solubles dans la politique

La prison, vraiment, c’est trop pénible ! Et puis, en France, les prisons sont trop pleines, comme une boîte qui déborde. Alors un gentil rapport explique que pour faire de la place, on devrait laisser sortir un peu plus tôt certains détenus, sauf bien sûr les méchants qui ont fait des choses très très graves.

Et si vous avez l’impression que les autorités vous prennent pour des enfants immatures, c’est exact mais cela ne changera rien : oui oui, vous avez bien lu le premier paragraphe et oui oui, il est bel et bien question d’une réduction de peine exceptionnelle pour tous les détenus pour résoudre la surpopulation carcérale actuelle.

L’idée générale est d’une simplicité biblique : puisqu’il y a trop de détenus, réduisons les peines, cela libèrera de la place ! Et pour bien faire comprendre les enjeux et toute la difficulté des conditions de détentions actuelles, vite, vite, réalisons l’un ou l’autre reportage pour décrire la situation avec toute l’objectivité des médias officiels !

L’avantage d’y aller aussi gaillardement, c’est que personne ne s’appesantira sur la notion pourtant étonnante de « trop de détenus » et qu’avec un peu de travail, on pourra faire oublier l’état exact des conditions de détentions dans les établissements français qui, si elles sont loin d’être bonnes – les cellules insalubres sont encore nombreuses, c’est un fait bien documenté – passera probablement un peu trop vite sous silence les aménagements actuels qui offrent une discipline qu’on pourra pudiquement qualifier de moins stricte que celle d’Alcatraz ou de Shawshank par exemple.

Il apparaît en effet que, parfois, à la faveur d’une diffusion sur les réseaux sociaux, le public découvre les étonnants passe-droits, aménagements et largesses dont bénéficient sinon tous les détenus, au moins certains et parfois les plus emblématiques. L’un des derniers exemples en date concernait par exemple Mohammed Amra dont on imagine sans mal que la détention n’était pas tout à fait un calvaire, exposant assez bien à quel point le système carcéral français était lui aussi sujet à la même corruption, au même laxisme et aux mêmes impunités que le reste de système judiciaire français.

En pratique, on le sait et c’est assez bien établi : les peines de prisons sont en réalité sous-utilisées. Rappelons d’ailleurs qu’il s’agit d’un laxisme institutionnalisé comme l’a montré une récente étude parue en février dernier et dont ces colonnes faisaient part à l’époque ; concrètement, lorsque la loi fixe des planchers, la justice effective les divise par deux ou trois et dix ans de prison se transforment en trois par la magie de jugements accommodants, de remises de peines et d’aménagements bricolés qui permettent à des condamnées à 20 ans de réussir l’exploit d’être pourtant multirécidivistes et multi-condamnés dans la même période.

De surcroît, lorsqu’on épluche les chiffres, on observe que sur les quasiment 100.000 personnes « sous écrou », la réalité oblige à noter que plus de 17.000 ne sont effectivement pas dans une cellule mais sous bracelet électronique (comme un ancien président de la République, par exemple) ou bénéficient d’un placement à l’extérieur. Autrement dit, l’utilisation de moyens alternatifs pour éviter les quatre murs d’une cellule sont déjà largement utilisés : si le gentil rapport qui préconise de relâcher plus tôt les pas-trop-méchants ne propose pas en échange d’augmenter la distribution de bracelets, c’est essentiellement parce que les équipes dédiées pour la gestion des détenus sous bracelets sont déjà surchargées.

Bien évidemment, le problème intrinsèque de ces gesticulations judiciaires qui seraient comiques s’il ne s’agissait pas de personnes condamnées donc a priori devant être écartées de la société civile, c’est que le laxisme actuellement institutionnalisé nourrit le laxisme.

D’un côté, ce laxisme est l’excuse pratique et clairement utilisée pour ne pas faire déborder les prisons – c’est même l’excuse directement utilisée par le rapport pour proposer un laxisme posé comme pragmatique – et de l’autre, on pousse à utiliser des peines alternatives (bracelet, liberté conditionnelle, sursis) afin de limiter l’usage de la détention, ce qui servira d’excuses pour ne pas construire de prisons supplémentaires.

En somme, de façon évidente, l’État n’est plus ici en train de gérer des détenus et d’essayer de trouver un moyen pour juguler la violence qui augmente dans la société. L’État, en toute décontraction et en l’expliquant presque ouvertement aux contribuables qui le financent, réalise une simple gestion logistique des flux en faisant ce qui lui paraît nécessaire pour que les contenus (ici, les condamnés) n’engorgent pas les tuyaux (ici, les prisons).

Dans ce contexte, les tubulures étatiques autorisent un flux constant d’environ 80.000 détenus, et dès qu’on est au-dessus, on a « trop de détenus » (i.e. les tuyaux sont sous pression et la pression, c’est mauvais pour le système, voyez-vous).

Magnifique système qui permet de gérer l’incarcération à rebours de ce que demandent les honnêtes gens : on n’incarcère plus en fonction des crimes, mais seulement en fonction des places. Si l’actualité produisait soudainement une floppée de criminels endurcis, on libérerait une floppée de petites frappes pour conserver l’incarcération courante dans le niveau de bande passante carcérale acceptable.

C’est lunaire : la surpopulation sert ici à justifier la désincarcération au lieu de justifier la création de cellules supplémentaires nécessaires à gérer l’augmentation naturelle de la population carcérale.

Et c’est d’autant plus lunaire que, dans le même temps, les bourgeois et la classe jacassante commencent à se réveiller sur certains problèmes qui pourrissent la société depuis maintenant plusieurs décennies et pour lesquels l’actuel ministre de la Justice espère faire croire qu’il agit :

Que peut-on espérer d’une telle gestion à la Gribouille où plus les uns se concentreront sur tel ou tel problème de société, plus il faudra compenser les incarcérations nécessaires par des remises de peine pour les autres ?

Et surtout, qu’espérer de ces dirigeants, de cette caste et de ces politiciens alors que les contribuables n’ont jamais été autant écrasés d’impôts pour un résultat si phénoménalement catastrophique ?

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