5 ans après son apparition, pourquoi les origines de la pandémie de Covid-19 n’intéressent plus grand monde ?
Cinq ans après l’émergence du SARS-CoV-2, identifié pour la première fois à Wuhan en décembre 2019, une étrange apathie semble s’être installée autour de la question de ses origines. Les premiers mois de la pandémie avaient pourtant été marqués par une quête de réponses. Aujourd’hui, cette curiosité semble avoir été reléguée dans les oubliettes du […]

Cinq ans après l’émergence du SARS-CoV-2, identifié pour la première fois à Wuhan en décembre 2019, une étrange apathie semble s’être installée autour de la question de ses origines. Les premiers mois de la pandémie avaient pourtant été marqués par une quête de réponses. Aujourd’hui, cette curiosité semble avoir été reléguée dans les oubliettes du discours public. Comment expliquer pareille indifférence ?
La pandémie de Covid-19 a laissé des traces profondes dans la psyché collective. Un psychologue de l’Université d’Alberta offre une grille de lecture inattendue : « Tout le monde oublie tout, tout le temps. Les gens développent des souvenirs lorsqu’ils vivent des expériences émotives – positives ou négatives. Mais pour plusieurs personnes, les confinements ont été d’un ennui mortel, une sorte de vide émotionnel. » Cette monotonie prolongée, entrecoupée de pics d’anxiété, a engendré une forme de lassitude psychologique qui s’est substituée à la curiosité initiale. Les sociétés, comme les individus, ont tendance à éviter les questions qui prolongent l’incertitude lorsqu’elles aspirent à retrouver un semblant de contrôle.
Entre impasse scientifique et incertitude géopolitique
Transmission zoonotique depuis le marché de Huanan à Wuhan ou fuite accidentelle d’un laboratoire ?
Au début cantonnée à la sphère complotiste, l’hypothèse d’une fuite de laboratoire a quelque peu gagné en crédibilité. Selon Atlantico, des fuites des services de renseignement américains et allemands suggèrent que des travaux sur des coronavirus proches du SARS-CoV-2 étaient menés à l’Institut de virologie de Wuhan mais, pour autant, aucune preuve directe qui pencherait en faveur de l’incident. Bref, les éléments disponibles ne permettent pas de trancher, et l’absence de transparence de la Chine conduit à penser que l’origine demeurera incertaine tant que le régime actuel restera en place. Cette opacité est un obstacle majeur, les données brutes demandées par les experts internationaux n’ont jamais été pleinement partagées. Et sans certitude, l’enquête s’est muée en débat qui s’est lui-même transformé en guerre de tranchées idéologiques. Un vrai champ de mines !
Surtout que les controverses sur les vaccins et les atermoiements autour des phases de confinement sont accusés d’avoir alimenté ce qui est perçu comme des mouvements populistes en Europe et aux États-Unis.
Un monde tourné vers le présent plutôt que vers le passé
Le désintérêt pour les origines du Covid s’explique également par une réorientation des priorités étatiques vers des enjeux plus immédiats et tangibles. Avec plus de 7,1 millions de décès officiels dans le monde – et jusqu’à 15 millions selon certaines estimations – la Covid-19 reste (qu’on le veuille ou non) une réalité. En France, des personnes meurent encore de cette.
Cela dit, des pressions politiques jouent aussi leur rôle. Le Telegraph rapporte qu’Angela Merkel aurait « enterré » le rapport du BND en 2020 pour préserver les relations sino-allemandes, tandis que le journal The Daily Mail accuse des agences occidentales, dont la CIA, d’avoir minimisé la piste du laboratoire chinois pour protéger des agents infiltrés en Chine. Ces révélations suggèrent finalement une véritable réticence à pointer Pékin. Mais alors pourquoi ? Crainte des tensions diplomatiques, peur de passer pour un média sinophobe ?
Cinq ans après l’émergence du Covid-19, l’indifférence apparente quant à ses origines ne relève ni d’un oubli volontaire ni d’une négligence coupable. La fatigue pandémique pousse les individus et les sociétés à l’oubli plutôt qu’à poursuivre la quête de la vérité. Celle-ci, peut-être, viendra en son temps. Mais ce temps est pour l’instant relégué dans un lointain indéterminé. En attendant, on continue à se fasciner pour les origines de la Peste et on méconnait le passé récent.