Notre-Dame du silence
Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. « J’aime qu’on me contredise ! » pourrait être sa devise... L’article Notre-Dame du silence est apparu en premier sur Causeur.

Habitué aux joutes médiatiques, hier comme dirigeant communiste, aujourd’hui comme chroniqueur politique, Olivier a des tripes et du cœur quand il s’agit de défendre ses idées. « J’aime qu’on me contredise ! » pourrait être sa devise

Alain Esquerre, lanceur d’alerte et victime qui a permis de déchirer le très long silence sur l’« affaire Bétharram », a un espoir : « Parvenir à susciter une réflexion sur le sens du déni collectif dont a souffert la société béarnaise, particulièrement ses enfants. » Et ailleurs, dans le pays, combien d’autres Bétharram ? Pas uniquement dans le privé, mais là où des enfants du hasard et de nulle part ont été « accueillis », puis dévorés. De quoi ce silence est-il le nom ? Que dit-il exactement de la façon « dont nous nous traitons les uns les autres ». Beth arram, en Béarn, signifie « beau rameau ». C’est ce rameau qu’Alain Esquerre et plus de 200 victimes, dont la moitié pour des violences et des crimes sexuels, tendent à notre humanité douloureuse. Le silence s’est transformé en un cri que personne aujourd’hui ne peut ignorer.
Hélène Perlant, fille aînée de François Bayrou, ancienne élève de l’établissement, dit « ça ne parle pas » et, avec pudeur et courage, elle explique le mécanisme de cet enfermement bien au-delà des murs de l’institution catholique béarnaise. Nationalement et localement, oubliant les victimes dont ils n’ont pas parlé, des « responsables » politiques n’ont eu qu’un objectif : atteindre et faire chuter François Bayrou. Silencieux avant sa nomination à Matignon, ils sont allés chercher une éphémère lumière médiatique de la pire des manières.
À la fin de son ouvrage, Le Silence de Bétharram (Michel Lafon), Alain Esquerre publie le poème d’une personne qui, elle, a voulu rester dans l’anonymat.
« Les enfants de Bétharram
Ont des soleils en pointillé,
Des rires volés aux jours de larmes
Et des printemps à réparer »
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La glace d’un très long hiver sur la plus grande affaire pédocriminelle des cinquante dernières années vient de fondre grâce à un homme qui a parlé, puis mis en ligne un groupe Facebook dédié aux victimes. Sans l’aide d’un avocat, sans réseaux, il a simplement tendu un rameau numérique avec l’espérance de mains qui viendraient le saisir.
Pour réparer des printemps, il s’agit de comprendre le processus du déni collectif. « Comment pouvons-nous faire mieux ? » interroge Esquerre. La société y est-elle prête ? Récemment, dans une rue paloise, une dame très distinguée m’a abordé avec un seul message concernant Bétharram : « Mais pourquoi remuer aujourd’hui toute cette merde, c’est du passé. » La vulgarité de son propos n’était pas raccord avec sa tenue vestimentaire. Avec une grave erreur d’analyse. Il ne s’agit pas d’un passé mais de notre avenir.
« Les enfants de Bétharram
Ont grandi sous des mains trop lourdes,
Des cauchemars dessous les draps
Et des ombres sur les épaules »
Bétharram était un véritable système que ce livre décortique. Dans les ténèbres surgissent aussi quelques lumières comme ce Jean-Rémy, victime lui aussi, qui devient « élève-surveillant », en charge du dortoir Sain-Augustin, celui des CM2. Il a protégé « ses petiots » du père Carricart. En février 2000, Carricart, ancien directeur de Bétharram, se suicide. Son corps est repêché à Rome dans les eaux du Tibre. Une expertise judiciaire est par la suite ordonnée pour s’assurer qu’il n’y a pas eu de substitution de cadavre. Après le rapport du légiste, qui confirme l’identité, il n’y a plus eu de poursuites judiciaires contre un Bétharramite. Il a fallu attendre… 2024. Un quart de siècle après, les eaux du Gave dans les vallées pyrénéennes commencent enfin à s’éclaircir.
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