L’Algérie, le poing faible d’Emmanuel Macron?
Un ultimatum et des divergences. Le 26 février, François Bayrou a annoncé qu’Alger disposait de « quatre à six semaines » pour réadmettre une liste prioritaire de personnes expulsées de France. Deux jours plus tard, en conférence de presse au Portugal, Emmanuel Macron a écarté toute possibilité de remettre en cause les accords migratoires, jugeant une dénonciation unilatérale insensée. « On ne va pas les dénoncer de manière unilatérale, ça n’a aucun sens ». De son côté, Bruno Retailleau continue de plaider pour une approche plus ferme... L’article L’Algérie, le poing faible d’Emmanuel Macron? est apparu en premier sur Causeur.

Un ultimatum et des divergences. Le 26 février, François Bayrou a annoncé qu’Alger disposait de « quatre à six semaines » pour réadmettre une liste prioritaire de personnes expulsées de France. Deux jours plus tard, en conférence de presse au Portugal, Emmanuel Macron a écarté toute possibilité de remettre en cause les accords migratoires, jugeant une dénonciation unilatérale insensée. « On ne va pas les dénoncer de manière unilatérale, ça n’a aucun sens ». De son côté, Bruno Retailleau continue de plaider pour une approche plus ferme.
Sans doute des analystes avertis de la vie internationale seraient-ils plus à même que moi de comprendre et d’expliquer l’étrange contraste du comportement présidentiel. Entre d’un côté son attitude irréprochable, au nom de la France et de l’Europe, face à la Russie et pour la sauvegarde de l’Ukraine avec tout le respect dû au président Zelensky, et de l’autre son entêtement dans une politique de faiblesse à l’égard de l’Algérie.
Tebboune a-t-il des dossiers sur le président français ?
Je tiens d’autant plus à voir clair dans cette alternative que j’ai encore dans l’esprit et la vision la honteuse prestation du couple dirigeant américain face à la solitude vaillante mais humiliée du président ukrainien. Avec pour conséquences inéluctables des insultes russes – Medvedev s’est particulièrement distingué dans l’outrance bestiale – et l’appel à la mesure et à la rationalité du président français. Celui-ci, n’en déplaise à ses adversaires compulsifs, continue son sans-faute sur ce plan et, on peut le dire sans tomber dans la grandiloquence, sauve l’honneur du camp occidental.
Pourquoi est-il si irréprochable à propos du lointain et tellement décevant au sujet du proche, l’Algérie ?
Éliminons d’emblée les thèses complotistes qui par exemple supputent que le président algérien saurait « des choses » sur Emmanuel Macron qui serait ainsi condamné à la frilosité…
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Il me semble d’abord que malgré la proximité créée par notre histoire commune avec l’Algérie, le conflit relève de la vie internationale dont on sait qu’elle est le domaine exclusif du président. Et bien davantage depuis que son implication demeure la seule manière de montrer qu’il a encore du pouvoir avec en plus un ministre des Affaires étrangères sans éclat… Il ne tient pas à sacrifier cette part qui lui reste.
Cette volonté est d’autant plus affirmée qu’elle jette une lourde pierre dans le camp du Premier ministre – qui en plus avait eu l’outrecuidance d’évoquer un référendum quand Emmanuel Macron s’en était réservé l’idée, encore dans les limbes aujourd’hui ! – et du ministre de l’Intérieur. Pourtant François Bayrou avait conçu, dans une démarche progressive et intelligente, une riposte au cynisme algérien et Bruno Retailleau avait bien été obligé de se mêler de ce sujet puisque le président paraissait s’en désintéresser.
Les accords de 1968 sur la balance

On constate que le président Macron n’a d’ailleurs repris publiquement la main que pour s’opposer à une rupture unilatérale, récuser la révision des accords de 1968 et vanter une solution diplomatique qui paraît au point mort avec la crainte tragique pour la vie de Boualem Sansal. Et notre humiliation avec ces malfaisants Algériens commettant des horreurs sur notre sol que leur pays, contrairement au droit international, refuse de reprendre sur un mode obstiné et arrogant.
Faut-il voir dans ce désaveu présidentiel autre chose qu’une manœuvre de politique intérieure ? Par exemple, analyser le refus de la fermeté comme la crainte qu’on projette la lumière non pas sur la reconnaissance du Sahara occidental mais sur l’embardée qui a conduit la France, en faveur du Maroc, à radicalement changer son point de vue sans que progressivement l’Algérie ait pu s’y préparer ?
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Sur un plan psychologique, ne retrouve-t-on pas la constance d’un caractère qui s’est défié de l’autorité régalienne et qui en revanche, dans le registre international, s’est parfois surestimé au point de s’imaginer capable de résoudre les conflits par la seule force de son argumentation et d’un dialogue au plus haut niveau ? Pourtant cette présomption, si elle l’habite, aurait dû se dissiper en voyant le peu de résultats, voire les conséquences négatives de ses entremises, avec Donald Trump encore récemment.
Il y a un moment où, en matière géopolitique, une certaine fermeté n’est pas une faute ni une impulsivité fâcheuse mais sans doute l’unique moyen de concilier les intérêts de son pays (OQTF), le refus de le voir ridiculiser et l’honneur de s’attacher à une cause universelle (Boualem Sansal).
L’Algérie est clairement le poing faible du président de la République. Je ne voudrais pas qu’à cause de cette disposition, la France se retrouvât au tapis…
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