Bayrou droit dans ses notes

Hier à l’Assemblée nationale, le Premier ministre a été auditionné pendant plus de cinq heures par la commission d’enquête sur les violences scolaires. Malgré l’attitude inquisitoriale, aux visées politiciennes évidentes, du co-rapporteur LFI Paul Vannier, il a pu apporter, avec force documents, des éclairages importants sur l’abominable affaire Bétharram... L’article Bayrou droit dans ses notes est apparu en premier sur Causeur.

Mai 16, 2025 - 02:24
 0
Bayrou droit dans ses notes

Hier à l’Assemblée nationale, le Premier ministre a été auditionné pendant plus de cinq heures par la commission d’enquête sur les violences scolaires. Malgré l’attitude inquisitoriale, aux visées politiciennes évidentes, du co-rapporteur LFI Paul Vannier, il a pu apporter, avec force documents, des éclairages importants sur l’abominable affaire Bétharram.


Il était logique que François Bayrou soit entendu par la commission sur les « modalités du contrôle par l’État et de la prévention des violences dans les établissements scolaires ». Habitant à une quinzaine de kilomètres de Bétharram, école privée catholique où trois de ses enfants ont été scolarisés et où son épouse a été un temps dame catéchiste, le chef du gouvernement était ministre de l’Education nationale lorsqu’une première plainte a été déposée en 1996 contre un surveillant de l’établissement suite à des coups portés à un élève. Quoi de plus normal que de lui demander de revenir sur cet épisode de sa vie politique et familiale, certes vieux de près de trente ans ?

LFI instrumentalise une affaire atroce

L’audition aurait donc pu se dérouler dans une ambiance sereine et constructive, ne serait-ce que par respect pour les victimes de ce scandale sans nom (on parle de 300 enfants agressés au cours de plusieurs décennies, et d’une trentaine de pédocriminels protégés par leur hiérarchie) mais aussi en vertu d’une certaine décence républicaine – François Bayrou n’est, rappelons-le, soupçonné d’aucune infraction dans ce dossier, il peut même estimer être une victime indirecte de Bétharram puisque l’une de ses filles a récemment indiqué avoir été tabassée, enfant, par l’un des bourreaux de l’établissement.

A lire aussi, Olivier Dartigolles: Notre-Dame du silence

Mais c’était sans compter sur le jeu trouble de l’un des deux corapporteurs de la commission, le député insoumis Paul Vannier, qui s’est comporté non pas en élu de la nation contrôlant l’action de l’exécutif – ainsi que son mandat l’exige – mais en accusateur public proférant, sans preuves solides ni respect du contradictoire, de graves allégations contre François Bayrou. « Pourquoi n’avez-vous pas protégé les élèves de Notre-Dame de Betharram, victimes de violences pédocriminelles ? » lui avait-il carrément lancé le 11 février dernier lors d’une question au gouvernement.

Triste farce

Hier, la séance a même tourné à la triste farce lorsque le Premier ministre a été interrogé par M. Vannier au sujet de la claque qu’il a donnée à Strasbourg en 2002 devant les caméras à un jeune garçon lors de sa campagne présidentielle. Comme si l’enfer de Bétharram avait un quelconque rapport avec cette minuscule anecdote…

Mais surtout, quoiqu’en disent depuis ce matin les commentateurs apeurés à l’idée de passer pour des soutiens du pouvoir, M. Bayrou a apporté hier devant la commission des réponses claires aux insinuations infâmantes de son opposant mélenchoniste.

S’il a confirmé avoir demandé, en 1996, au recteur de Bordeaux une enquête urgente sur Bétharram suite aux révélations par la presse d’une première plainte pour coups et blessures (sans agression sexuelle), le Premier ministre a aussi reconnu n’avoir lu que la conclusion – plutôt favorable – du rapport de ladite inspection laissant croire à un cas isolé et pas à une violence systémique. Et s’il ne se rappelle plus avoir conversé, deux ans plus tard en 1998, alors qu’il était redevenu élu d’opposition, avec son voisin magistrat Christian Mirande au sujet d’un dossier de viol impliquant un religieux de l’établissement, il a admis que ce fait était possible, tout en relevant que son interlocuteur assure ne pas pour autant avoir violé le secret de l’instruction lors de cet échange.

A lire aussi, Pierre Lurçat: Le pape Léon XIV, J.D. Vance et nous

Bref, François Bayrou n’a manifestement pas fait preuve dans cette affaire d’un zèle exceptionnel ni d’une grande clairvoyance. Cela constitue-t-il une grave faute ? Sur le plan judiciaire, certainement pas. Sur le plan politique, il est peu probable que cela lui vaille une motion de censure. Sur le plan moral, qui croira qu’il aurait pu se douter et donc empêcher les horreurs de Bétharram ?

L’article Bayrou droit dans ses notes est apparu en premier sur Causeur.