Vous avez dit submersion?
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Dans les grandes villes du monde entier, les populations de rats sont en forte augmentation en raison du réchauffement climatique, selon une vaste étude.
Le Guardian vient de publier la synthèse d’une étude scientifique très intéressante conduite notamment par le professeur Jonathan L Richardson du département Biologie de l’université américaine de Richmond. L’objet de cette étude, l’évolution de la population des rats dans les grandes métropoles ces dix dernières années.
Il ressort de ces enquêtes que cette population explose littéralement. On peut donc légitimement parler de risque de submersion. Submersion souterraine, qui ne saute donc pas trop aux yeux, mais cependant bien réelle.
En dix ans la population de rats aurait ainsi augmenté de 390% à Washington, de 300 % à San Francisco, de 162% à New York, de 186% à Toronto. D’autres grandes cités connaissent naturellement un phénomène comparable : Oakland, Buffalo, Chicago, Boston, Kansas City, Cincinnati et, plus près de nous, Amsterdam…
La cause principale de cette spectaculaire croissance des populations de muridés, le réchauffement climatique. La hausse moyenne des températures a en effet pour effet d’étendre la période de reproduction de ces animaux sur l’année entière. « Le fait que le nombre de rats augmentent le plus rapidement dans les villes qui se réchauffent le plus vite est le résultat le plus inquiétant de l’étude », déclare le professeur Richarson. « Pour Londres et pour Paris qui ne figurent pas dans l’analyse, fautes de données disponibles, note-t-il, il n’y a aucune raison que ce soit différent. » Bref, sous nos pieds, ça grouille. Et ce ne serait qu’un début !
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« À Toronto, les hivers froids jouaient un rôle de contrôle naturel des nuisibles, précise au Guardian Alice Sinia, entomologiste chez Orkin, la plus grande entreprise de lutte antiparasitaire du Canada. Ce n’est plus le cas. » Seule deux très grandes villes ont, à ce jour, réussi à contrôler le phénomène et enregistreraient une baisse des populations. Elles y sont parvenues en imposant des normes drastiques d’hygiène, une gestion stricte des déchets et en maintenant la pression par de puissantes et permanentes campagnes de sensibilisation. Ce sont Tokyo et La Nouvelle-Orléans.
Or, nous n’ignorons pas que chez nous, au conseil municipal de Paris, le rat est plutôt bien vu. D’ailleurs on prend soin de lui donner son nom « officiel » et plus chic de surmulot. Il se pourrait même que, bientôt, le qualifier de nuisible constituerait une insulte à caractère discriminant – sur le mode peu ou prou de l’insulte raciste – et serait donc passible des tribunaux. Le rat est qualifié dans ces cercles éclairés d’un animal liminaire, cela en vertu de la théorie conçue par deux philosophes canadiens, Sue Donaldson et Will Kymlicka, particulièrement engagés dans la défense des droits des animaux. En 2011, ils ont publié un ouvrage à succès, Zoopolis. Les animaux y sont classés en trois grandes catégories. Les sauvages y sont qualifiés de « souverains ». Les domestiques de « citoyens ». Les animaux liminaires (vivant presque exclusivement dans la proximité de l’homme, le rat, le pigeon…) sont quant à eux étiquetés « résidents permanents ». Voilà la bible en odeur de sainteté au sein de l’actuelle municipalité parisienne. On est donc loin de l’indispensable prise de conscience de la gravité et de l’urgence de la situation. Les dégâts causés par les rats se chiffrent en milliards (27 milliards de dollars annuellement pour les seuls Etats-Unis d’Amérique). Et on dénombre quelque soixante maladies – certaines mortelles – transmissibles à l’homme, véhiculées par ces sympathiques hôtes de nos égouts, caves, parcs et jardins.
Les élections municipales approchent. Quel candidat aura le courage de prendre le surmulot par les cornes, de proposer un vrai programme de lutte contre cette submersion souterraine, sournoise, effrayante ?
Il ne faudrait pas, tout de même, que, à force de prospérer, le rat devienne ultra-majoritaire chez nous et que, nous autres, bipèdes, nous nous retrouvions un beau jour relégués dans une sorte de catégorie « humains liminaires » qui ferait de nous des « résidents permanents » tout juste tolérés… J’y pense soudain : surtout qu’on n’aille pas chercher à décrypter dans ces lignes une esquisse de métaphore d’un quelconque phénomène de surface ! Loin de moi ce genre d’amalgame. Quoique, réflexion faite…
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