Les migrants, la fête au village et le parc d’attractions

Offrir un séjour pour éviter des débordements lors d’une prochaine fête de village aux Pays-Bas: c'est la drôle idée du Centraal Orgaan opvang asielzoekers (Accueil des Demandeurs d’Asile) qui a ulcéré une ministre. Récit... L’article Les migrants, la fête au village et le parc d’attractions est apparu en premier sur Causeur.

Mai 15, 2025 - 17:28
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Les migrants, la fête au village et le parc d’attractions

Offrir un séjour pour éviter des débordements lors d’une prochaine fête de village aux Pays-Bas: c’est la drôle idée du Centraal Orgaan opvang asielzoekers (Accueil des Demandeurs d’Asile) qui a ulcéré une ministre. Récit.


Et si, en France, on offrait aux « jeunes des quartiers » un séjour dans un parc d’attractions1 pour les éloigner de fêtes de village ou fêtes foraines où ils pourraient semer la pagaille? Élucubrations, caricature malveillante de bonnes intentions ? En fait, cela se rapproche d’un projet de l’instance néerlandaise chargée de l’Accueil de Demandeurs d’Asile, le COA.
Dès qu’elle en a eu vent, cependant, la ministre de l’Asile et des Migrations, Mme Marjolein Faber, a opposé son véto, fustigeant « un voyage d’agrément aux frais des contribuables ».

Prime pour mauvaise conduite

Car le voyage offert par le COA était destiné aux migrants mineurs d’un centre d’accueil situé dans le village Sint Anne dans la province de Frise où, en mai 2024, trois jeunes autochtones furent blessés de coups de couteau lors de la fête annuelle. Des habitants du centre figurent comme suspects. Pas étonnant, donc, que les villageois préfèrent célébrer la prochaine fête, qui commence le 16 mai, entre eux.
Le COA, une fois n’est pas coutume, était de leur côté. Mais sa solution revenait, selon la ministre Faber, à une « prime pour mauvaise conduite à de potentiels fauteurs de troubles ».
Car le parc d’attraction en question, situé à Efteling, dans la province de Brabant, se situe à 240 kilomètres au sud du camp pour jeunes migrants. Des familles néerlandaises peu fortunées doivent se saigner à quatre veines pour s’y offrir une journée.
Comme de coutume, la presse néerlandaise dite de qualité a vilipendé la ministre pour sa mesquinerie et cette fâcheuse tendance à considérer tout demandeur d’asile comme un criminel en puissance. « Un voyage en car, d’accord, mais pour les expulser » a-t-elle répondu, pour chambrer ses critiques. La ministre est membre du Parti pour la Liberté de M. Geert Wilders, pilier principal de la coalition gouvernementale. Dans les journaux, il n’est pas rare de la voir caricaturée en garde-chiourme, sanglée dans un uniforme style nazi.
Le COA a finalement annulé le projet controversé, mais a promis d’organiser d’autres activités pour les quelque quarante jeunes, sur 400 résidents, du centre de Sint Anne, village de quelque 4500 habitants. Des campagnes de financement collectif par des citoyens outrés par la ministre ont recueilli plus de 250000 euros pour les jeunes, de quoi les choyer sur la Côte d’Azur durant les trois jours de fête dans leur village en Frise.

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Drague lourde

Les grands médias néerlandais ont évidemment sacrifié leur devoir d’informer sur l’autel de l’indignation morale. La presse régionale avait, elle, fait son boulot en rappelant que certains jeunes étrangers s’étaient récemment distingués par leur drague lourde de jeunes filles, par des vols, cambriolages et actes d’agression contre les contrôleurs de bus. Un site d’information avait décrit leur centre d’accueil comme une caverne d’Ali Baba, où les fruits des larcins étaient mis en vente sur internet2.
Rien de tout cela n’a évidemment percé la bulle de suffisance des grands médias, décrivant parfois à tort les demandeurs d’asile adolescents comme des enfants, sous-entendus innocents et souffrant de la cruauté de la ministre. Un chroniqueur de l’audiovisuel public les plaignait, « condamnés qu’ils sont à vivre dans un trou comme Sint Anne3 ». Les violences pendant la fête foraine de 2024 n’auraient été qu’une « rixe » entre de jeunes locaux, les identités des suspects passées sous silence.
Ce qui rappelle le drame de Crépol dans la Drôme, où, en novembre 2023, le jeune Thomas Perotto fut mortellement poignardé. L’utilisation du mot rixe faisait alors débat, car impliquant que les torts étaient partagés entre villageois et jeunes issus de l’immigration algérienne venus importuner le « bal d’hiver ». Toujours est-il que le sang versé, à Crépol comme à Sint Anne, a été celui de jeunes Blancs, non pas celle de leurs agresseurs présumés.
Pas étonnant qu’aux Pays-Bas, de plus en plus de villages résistent, parfois violemment et avec succès, aux projets d’y installer des centres de migrants, lesquels y sont aussi peu appréciés que des usines de traitement de déchets nucléaires. Et à chaque fois, le soutien au parti de Mme Faber y monte en flèche.


  1. https://www.efteling.com/fr ↩
  2. http://franekeractueel.nl/ ↩
  3. https://www.youtube.com/watch?v=echSO3uReFI ↩

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