Pourquoi Frédéric Taddéï est-il si convaincant ?

Celui que le quotidien de gauche Le Monde qualifie de « dandy du débat télévisé » - pour mieux critiquer tout de suite après ses prestations sur RT France ou CNews -, est désormais directeur de l’hebdomadaire Marianne... L’article Pourquoi Frédéric Taddéï est-il si convaincant ? est apparu en premier sur Causeur.

Avr 9, 2025 - 17:48
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Pourquoi Frédéric Taddéï est-il si convaincant ?

Celui que le quotidien de gauche Le Monde qualifie de « dandy du débat télévisé » – pour mieux critiquer tout de suite après ses prestations sur RT France ou CNews -, est désormais directeur de l’hebdomadaire Marianne.


Directeur de Marianne, Frédéric Taddéï écrit à la dernière page, comme il se doit, « Le mot de la fin ». Dans le numéro en cours : « … Il faut abolir cette peine de mort politique qu’est la peine d’inéligibilité ». Je sais que son point de vue sera contredit aussi bien pour des motifs politiques que médiatiques. C’est le propre des idées fortes et ce n’est pas Frédéric Taddéï qui s’en plaindra ! Je n’ignore pas avoir déjà écrit sur Frédéric Taddéï et je ne ressens pas le besoin de m’en excuser. D’abord pour ma propre satisfaction. Je déplais trop souvent par une envie, à laquelle je ne veux résister, de dire le fond de ma pensée, la nature de mes humeurs, pour ne pas me féliciter de cette opportunité renouvelée de pouvoir estimer quelqu’un.

J’ajoute que le Frédéric Taddéï d’aujourd’hui a changé de registre. L’indépassable animateur de « Ce soir (ou jamais ! ») – dont l’effacement et la discrétion apparents valaient toutes les présences ostensibles – a été remplacé par le responsable d’une publication qui, sur le plan judiciaire notamment, est remarquable et par l’auteur libre et indépendant du Mot de la fin.

Un fervent défenseur de la liberté d’expression

À plusieurs reprises, j’ai soutenu Frédéric Taddéï qui n’avait pas besoin de moi pour se défendre. Le paradoxe est qu’on osait lui reprocher une conception intelligemment intégriste de la liberté d’expression contre celle rigide et sectaire cultivée chaque jour par Patrick Cohen. Frédéric Taddéï n’était pas un justicier qui choisissait de laisser parler seulement ceux que sa vision politique tolérait : il ouvrait la porte médiatique à tous, et d’abord à ceux auxquels l’accès à la visibilité était devenu impossible, voire interdit. Sa seule exigence toujours parfaitement respectée, à la télévision, tenait à cette limite : on ne transgressait pas la loi sur son plateau. Cette éthique et ce pluralisme du débat ont donné lieu à de passionnantes joutes où la contradiction, contrairement à tant de confrontations d’aujourd’hui, n’était pas de pure forme.

Frédéric Taddéï est d’abord pour moi un modèle dans la mise en œuvre, sans la moindre concession, d’une liberté d’expression exemplaire. J’aime pouvoir le rapprocher d’une journaliste essayiste atypique, Peggy Sastre, dont les points de vue, développés dans Causeur ou dans Le Point, offrent à qui les lit un champ stimulant de réflexions et de paradoxes. Elle s’attache à définir rigoureusement la liberté d’expression en faisait appel, notamment dans le dernier hebdomadaire cité, à des intellectuels qui confirment sa vision d’une plénitude irréprochable.

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Quand elle écrit qu’ « une liberté d’expression qui n’oserait plus froisser personne deviendrait vite une liberté à usage limité », nul doute que Frédéric Taddéï partage sa conviction. Lorsqu’elle reprend à son compte l’analyse de Greg Lukianoff, un avocat, journaliste et militant américain, pour qui la liberté d’expression « est et restera toujours une idée ÉTERNELLEMENT RADICALE… pas seulement une garantie juridique mais un principe culturel exigeant dont la valeur ne se révèle qu’à l’épreuve de l’inconfort », je suis sûr que Frédéric Taddéï approuve cette approche irréprochable d’une liberté qui est beaucoup moins pour soi que pour les autres.

Un homme convaincant

Quand j’ai commencé à lire son « Mot de la fin » dans Marianne, j’ai éprouvé comme une émotion intellectuelle à voir le changement de cap de Frédéric Taddéï qui s’assignait, sur un certain nombre de thèmes, à penser et à dire ce que longtemps il avait eu pour déontologie de taire. J’ai naturellement pris son parti et je ne me suis pratiquement jamais trouvé en désaccord avec lui. Moins, pour être franc, parce que le fond de son écrit était forcément pertinent qu’à cause de la confiance immédiate, évidente, limpide dont je créditais un esprit et une personnalité qui, n’ayant jamais eu pour perversion d’étouffer ou de limiter le verbe d’autrui, bénéficiaient de mon assentiment quand ils s’aventuraient dans l’imprévisibilité de l’opinion et les nuances de la conviction.

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Je me défie de plus en plus des censeurs officiels ou officieux qui, ayant toujours eu la vocation d’éradiquer, sur le plan politique, médiatique, judiciaire ou culturel, la liberté des autres, n’ont jamais su la pratiquer pour eux-mêmes.

Parce que Frédéric Taddéï est aux antipodes d’une telle petitesse, qu’il a passé son existence médiatique à se battre pour la liberté des autres, il me semble que porter sur celui qu’il a décidé d’être aujourd’hui, sur ses débuts brillants dans le Mot de la fin, un regard favorable, au moins une bienveillance critique, est la moindre des choses. Il est convaincant parce qu’il n’a aucune rançon à payer.

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