Managers, quand votre employé apporte une mauvaise idée, faut-il la rejeter avec humour ?
C’est la version corporate du « Peut-on rire de tout ». Dans un cadre professionnel, recourir à l’humour pour désamorcer des situations tendues est-il possible ? La réponse vous fera-t-elle rire ?

C’est la version corporate du célèbre « Peut-on rire de tout ». Est-il possible dans un cadre professionnel de recourir à l’humour pour désamorcer des situations tendues. La réponse pourrait vous étonner. Et vous faire rire ?
Imaginez la situation suivante : l’un de vos employés vient vous voir avec une idée. Il ou elle souhaite apporter des modifications à l’une de vos procédures. Votre employé est convaincu que son idée est géniale, mais, en tant que manager, vous en voyez immédiatement les défauts. Peut-être est-elle peu pratique, trop coûteuse… Ou tout simplement n’est-elle pas la priorité du moment.
Vous savez que vous devez la refuser. Mais voici le dilemme : vous ne voulez pas que l’apporteur d’idées se décourage et n’ose plus jamais s’exprimer. Après tout, sa prochaine suggestion pourrait être super ! Alors, au lieu d’un rejet brutal, vous adoucissez le coup avec un peu d’humour :
« C’est une idée audacieuse, peut-être un peu trop audacieuse pour notre budget ! » répondez-vous avec un sourire.
Cela semble être une bonne stratégie. Mais est-ce vraiment le cas ? Votre employé se sentira-t-il à l’aise pour revenir avec une autre idée, ou pensera-t-il que vous vous moquez de lui et décidera-t-il que cela ne vaut pas la peine ? Nous posant la même question, nous avons mené une étude pour le savoir.
Les risques d’un recours à l’humour
Nous avons interrogé plus de 300 employés à trois reprises sur une période de trois semaines. Nous nous sommes concentrés sur les employés qui avaient récemment proposé une idée à leur manager – qui a ensuite été rejetée. Certains de ces responsables ont rejeté ces idées avec une réponse plutôt directe tandis que d’autres ont cherché à utiliser différents degrés d’humour.
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Ce que nous avons découvert remet en question les idées reçues. Bien que plusieurs experts estiment que l’utilisation de l’humour dans un contexte professionnel est risquée car elle pourrait donner aux collaborateurs l’impression que leurs idées ne sont pas prises au sérieux, nos résultats suggèrent le contraire. Plus précisément, les managers qui ont rejeté des idées avec humour ont en fait augmenté la volonté de leurs employés à s’exprimer à nouveau à l’avenir. L’utilisation de l’humour semblait indiquer aux collaborateurs que ce rejet n’était pas « personnel », ce qui leur a permis ensuite de se sentir en sécurité pour continuer à faire part de leurs idées par la suite.
Et voici le résultat le plus surprenant : l’humour était particulièrement bénéfique pour les employés qui étaient les moins proches de leurs managers. Pour ceux-ci, qui ne se sentaient pas particulièrement proches de leurs managers, l’humour aidait à combler ce fossé, les mettant plus à l’aise pour s’exprimer et proposer davantage d’idées à l’avenir.
Un outil social puissant
Pourquoi l’humour fonctionne-t-il ? L’humour est un outil social puissant. Il peut aider à désamorcer les tensions sociales, créer un sentiment de camaraderie et indiquer qu’une situation n’est pas aussi grave qu’on pourrait le penser. Lorsqu’un manager utilise l’humour, il ou elle dit subtilement à son employé que ses efforts sont appréciés et que le fait de rejeter ses idées ne signifie pas qu’il ne les apprécie pas.
Notre étude a montré que les employés interprétaient l’humour de la même manière : que leur responsable n’était pas contrarié ou dédaigneux, ce qui les mettait plus à l’aise pour exprimer leurs idées à l’avenir.
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L’humour oui ! Le sarcasme non !
Cependant, avant de commencer à plaisanter chaque fois que vous voulez rejeter des idées, nous devons mentionner une mise en garde importante : le type d’humour utilisé a vraiment son importance.
Une blague qui semble sarcastique, condescendante ou dédaigneuse peut facilement se retourner contre vous. Par exemple, si une personne avec laquelle vous travaillez suggère une amélioration d’un processus de l’entreprise et que vous répondez : « Bravo pour votre imagination ! Malheureusement, nos comptables pourraient lui donner un cinq sur vingt », la personne risque de se sentir ridiculisée plutôt qu’encouragée.
Par conséquent, il faut respecter ces trois principes lorsqu’on utilise l’humour :
- Il faut être bienveillant : l’objectif est de rendre le rejet moins sévère, et non de rabaisser la personne ou son idée.
À faire : rassurer les employés en leur disant que le rejet n’est pas personnel tout en reconnaissant la valeur de leur contribution.
À ne pas faire : rejeter les employés.
Un humour partagé
- Votre relation avec votre équipe est aussi importante que la blague elle-même : vous devez garder à l’esprit que certaines personnes sont plus susceptibles d’apprécier votre humour que d’autres.
À faire : consentir un effort supplémentaire avec ceux avec lesquels vous avez une relation plus formelle et distante, car ils apprécieront votre effort supplémentaire.
À ne pas faire : ne vous sentez pas obligé de plaisanter avec ceux qui sont les plus proches. Ils vous apprécient déjà, il est donc peut-être plus important de leur faire des commentaires plus clairs que de rejeter leur proposition en plaisantant.
- L’humour est un signal ; assurez-vous donc que vos employés le comprennent. Les employés recherchent des indices subtils dans votre comportement lorsqu’ils se mettent en quatre pour vous proposer des idées novatrices. Si votre blague est mal interprétée, elle peut se retourner contre vous.
À faire : assurez-vous que vos intentions sont bienveillantes. Montrez votre appréciation avec votre humour.
À éviter : utiliser un humour agressif ou négatif, car il risque davantage de se retourner contre vous.
L’humour n’est pas un feedback
Pour résumer, voici quelques conseils pratiques pour les managers :
Utilisez l’humour pour adoucir, pas pour se protéger. Une blague devrait rendre le rejet plus léger, mais elle ne devrait pas remplacer un feedback clair et constructif.
Adaptez l’humour à la relation. Si vous avez déjà une bonne relation avec le/la collaborateur (trice), il peut être préférable de se concentrer sur une communication claire et honnête. Cependant, si la relation est plus faible, utilisez des formes d’humour plus douces, positives et bienveillantes lorsque vous rejetez ses idées.
Assurez un suivi. Si vous rejetez une idée avec humour, renforcez votre ouverture d’esprit en vérifiant plus tard. « Hé, j’apprécie vraiment que vous ayez soulevé ce point. Continuez à proposer des idées. »
Restez professionnel. L’humour ne doit jamais être personnel ou se faire aux dépens d’un collaborateur.
Une question de dosage
Faut-il utiliser l’humour ? Oui, mais avec sagesse. Bien utilisé, l’humour peut aider vos employés à accepter plus facilement un refus et les encourager à continuer de proposer des idées. C’est particulièrement vrai pour ceux et celles qui n’ont pas encore de relation solide avec vous.
Ainsi, la prochaine fois qu’un de vos employés vient vous voir avec une idée dont vous savez qu’elle ne fonctionnera pas, envisagez de faire une petite blague au lieu de lui dire carrément « non ». Parce que si l’idée d’aujourd’hui n’est peut-être pas réalisable, celle de demain pourrait bien l’être, et vous voulez qu’il/elle se sente suffisamment en confiance pour la partager ! Avez-vous des anecdotes sur l’humour sur le lieu de travail ? Racontez-nous ce qui vous est arrivé dans les commentaires ci-dessous…
Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.