Ce somptueux opéra à 2h de Lyon est le seul de style Art Nouveau en France

Après la chaîne des Puys-Faille de Limagne, la ville de Vichy est devenue en 2021 le deuxième site auvergnat à être classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Une distinction que la cité auvergnate doit à son fascinant patrimoine, à commencer par ce somptueux opéra de 1480 places, soit le deuxième plus grand de France derrière l’Opéra Garnier, qui va bientôt fermer ses portes.

Une prouesse architecturale aussi envoûtante qu’un opéra

L’histoire de ce site commence par la demande de Napoléon III de bâtir un premier casino en 1864-1865. Disposant d’une salle de théâtre, son aspect démodé et l’insuffisance des services qu’il peut proposer conduisent à une extension au début du XXe siècle, et l’ancien théâtre devient notamment une salle de jeu, aujourd’hui transformée en grand auditorium du palais des congrès. Inauguré en deux temps, en 1901 puis en 1903, ce nouvel opéra est l’œuvre des architectes Charles Le Cœur et Lucien Woog. Non content d’être le premier opéra à l’architecture Art Nouveau en France, l’Opéra de Vichy offre une singularité qui se ressent en pénétrant dans la salle de théâtre : celle-ci n’affiche pas les couleurs rouge et or traditionnelles, mais un déluge de jaune et d’ivoire, rehaussés d’un décor géométrique, symétrique et floral. Des artistes de grand talent sont à l’origine de cette décoration, du sculpteur d’ornement Pierre Seguin au ferronnier d’art Emile Robert. Tout aussi unique, le style décoratif est voué aux délices floraux, à l’image de la coupole lumineuse entourée par une couronne de roses et une couronne de lyres, tandis que le front de scène est orné de deux paons blancs qui protègent deux harpes et encadrent les dates 1864 et 1901, dominées par le masque de la tragédie. Une décoration d’une grande originalité que l’on doit au peintre décorateur parisien Léon Rudnicki. Ultimes preuves de cet attachement aux délices floraux : la façade principale de l’Opéra donne sur le Parc des Sources et, au rez-de-chaussée, les trois grandes portes sont décorées de grilles fleuries, forgées par Emile Robert, tout comme l’intégralité des balustrades et rampes du bâtiment.

Une histoire entre ombre et lumière

De 1901 à 1964, Vichy est ainsi “la capitale d’été de la musique”, où tout artiste de qualité se doit de se produire. L’Opéra possède alors, pour la saison qui s’étale de mai à septembre, son propre orchestre, ses chœurs, ses chanteurs, son corps de ballet et accueille, en invités, des chefs et solistes prestigieux. D’ailleurs, un orchestre de 100 musiciens, une troupe de chanteurs, danseurs et comédiens résident à Vichy à la belle saison.  Entre les deux guerres, l’Opéra connaît un fort rayonnement et de grands compositeurs y jouent leurs œuvres. Tout le répertoire lyrique est donné avec en moyenne 90 représentations chaque été, sans compter les spectacles de ballet, d’art dramatique et de variétés. La réputation est telle que, en 1935, le célèbre compositeur Richard Strauss préside un congrès international des compositeurs où 17 nations sont représentées. En juillet 1940, l’édifice est le théâtre d’un autre grand rendez-vous : celui du vote des pleins pouvoirs au Maréchal Pétain par les députés et sénateurs, à l’exception de 80 d’entre eux qui s’y opposent. Une plaque commémorant cet acte de résistance est aujourd’hui apposée à l’entrée de l’Opéra. Une fois la Seconde Guerre mondiale et la Libération passées, l’opéra retrouve son rôle d’organisateur de la vie artistique estivale, de 1952 à 1963, sous forme de festivals avec de magnifiques productions. Mais au même titre que le thermalisme décline, l’activité diminue peu à peu et les orchestres et troupes en résidence s’amenuisent, avant de disparaître en 1970.

 

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Fleuron d’une ville désormais reconnue par l’UNESCO

Malgré un chapitre particulièrement sombre durant la Seconde Guerre mondiale, Vichy peut non seulement compter sur son opéra, mais avant tout sur un incroyable patrimoine, pour s’affirmer aujourd’hui comme une destination touristique de choix. Inscrite parmi les onze villes les plus représentatives du thermalisme européen, Vichy s’est affirmée au fil des siècles comme la plus prestigieuse et la plus connue des villes d’eaux françaises. Structurée par la médecine thermale et ses eaux, utilisées depuis l’époque romaine et dotées de multiples vertus thérapeutiques, la cité auvergnate a connu une profonde transformation sous Napoléon III et le Second Empire, selon les principes urbains d’Haussmann à Paris. De cette époque sont donc nés de somptueux monuments, comme la Villa Strauss, réalisée pour le compositeur du même nom, ou le Chalet des Suppliques, fascinant bâtiment à mi-chemin entre le style néo-gothique et savoyard dont on raconte que le nom viendrait des suppliques adressées à Napoléon III lors de ses séjours dans la station thermale. Symbole de cette activité historique et jadis florissante, les villas de style néo-vénitien, flamand, gothique ou Art Nouveau du Quartier Thermal avaient toutes un point commun à leur construction : séduire pour être louées aux habitants saisonniers venus prendre les eaux et/ou être une carte de visite de leurs commanditaires. Et une charmante carte postale grâce à l’opéra qui, depuis sa rénovation en 1995, organise une soixantaine événements tout au long de l’année.

 

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Image à la une : Opéra de Vichy © Adobe Stock