California gay dream
Au cinéma, devant les romances homosexuelles à ne plus savoir compter des « Indomptés », on finit par pas mal s’ennuyer. Brokeback Miniature ! L’article California gay dream est apparu en premier sur Causeur.

Au cinéma, devant les romances homosexuelles à ne plus savoir compter des « Indomptés », on finit par pas mal s’ennuyer. Brokeback Miniature !
Indomptés, vraiment? S’il faut en croire le titre – titre original : On Swift Horses – , les quatre héros photogéniques du film font un attelage sauvage. Or à 62 ans, Daniel Minahan, cinéaste gay à qui l’on doit, entre autres, quelques mémorables épisodes des séries House of Cards et Game of Thrones, nous a plutôt concocté, en costumes et décors fifties, une romance californienne agréablement léchée, mais pas franchement iconoclaste.
Retour de la guerre de Corée, Lee (Will Poulter), tout jeune, candide et courageux péquenot coiffé à la banane, en couple avec Muriel (Daisy Edgar-Jones), réincarnation californienne de madame Bovary, est arrivé à persuader cette dernière de vendre la bicoque de feu sa mother bien -aimée, pour sacrifier leurs maigres ressources dans le patient achat à crédit d’une maisonnette, dans une Los Angeles en plein essor. Julius, aux antipodes de son frère cadet, mène une vie désordonnée, où ses gains frauduleux au poker le disputent à ceux, occasionnels, de passes rançonnées avec l’un et l’autre sexe, et aux impulsions qui le portent secrètement vers les hommes. Morale subliminale : on ne se refait pas.
Il est vrai que Julius, sous les traits de l’acteur australien Jacob Elordi (cf. Priscilla, O Canada et, bientôt, le rôle-titre du remake de Frankenstein sous les auspices de Guillermo del Toro, en novembre prochain sur Netflix), Julius, dis-je, est ce qu’on appelle une belle bête : 27 ans, 1m96 (!), des pecs durs, arrondis et légèrement gazonneux, des abdos glabres et lisses comme ceux qu’on connaît à la statuaire antique. Bref, si le scénar devait se chercher un alibi, cette somptueuse anatomie, jointe à une bouille de model boy, suffiraient, car tout est prétexte, d’un bout à l’autre, à faire Julius/Elordi littéralement dévoré par la caméra.
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Au reste, Muriel la première le mange des mirettes. Mais Julius est son beau-frère, tout de même, alors l’épouse rêveuse, fidèle et frustrée reporte sa passion vers les pur-sang, jouant avec flair aux courses hippiques, jusqu’à accumuler un petit pactole qu’en femme économe elle serre dans une enveloppe, dissimulant ses liasses de dollars derrière le miroir de la piaule conjugale. Entre deux escapades, le gay Julius reviendra la taper régulièrement mais en attendant, embauché comme taupe dans un casino de Las Vegas, l’Appolon géant tombe amoureux d’un collègue de travail, Henry (Diego Calva), exilé de Tijuana, latino mexicain torrentiel au plumard. De fil en aiguille, Muriel elle-même, initiée par une petite voisine coiffée à la garçonne qui lui vend des olives et des œufs, se découvrira des tentations saphiques.
Sans entrer dans les détails, ni vous déflorer l’intrigue jusqu’au fond, disons que le pitch du film, c’est qu’un peu comme chez Proust – toutes choses égales par ailleurs – , tous les protagonistes, excepté le gentil Lee (lequel au finish sacrifiera d’ailleurs son bonheur à la cause gay !) se voient pris dans les rets de leur désir : homosexuels, homosexuels quoiqu’ils fassent ! L’intention est un peu appuyée…
Située en 1956, à l’heure des tirs de bombe H dont on vient admirer en foule, au désert, la pyrotechnie spectaculaire, au cœur de cette Amérique 100% blanche qui n’a pas tendance à rigoler avec les faggets, la romance ne manque pas de charme, quand bien même la crédibilité du casting, férocement sujette à caution, prête à sourire : avec la meilleure volonté du monde, le bel Elordi n’atteindra jamais à la performance de son regretté compatriote Heath Ledger, lequel, dans Le Secret de Brokeback Mountain, ce chef d’œuvre de Ang Lee millésimé 2005, incarnait un cow-boy pris d’une passion homo dans un élevage de moutons…
Image ultra léchée, reconstitutions d’époque presque muséale par le soin accablant porté au moindre détail décoratif, bande-son égrenant néanmoins quelques sublimes morceaux, Les indomptés revêt la forme d’un conte bien empaqueté, pas franchement immoral, et même un peu trop soigneusement aseptisé pour qu’on s’y laisse prendre sans réserve.
Les Indomptés. Film de Danien Minahan. Avec Daisy-Edgar Jones, Jacob Elordi, Will Poulter, Diego Calva, Sasha Calle. Etats-Unis, couleur, 2024. Durée : 1h59.
En salles le 30 avril.
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