À Sao Paulo, sans famille

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Mar 19, 2025 - 15:16
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À Sao Paulo, sans famille

Un mélo gay dans la mégalopole brésilienne. Parfois un peu trop complaisant, voire sordide.


À 18 ans, après deux ans de cellule pour mineur au Brésil, comment recommencer sa vie ? Ayant perdu la trace de ses parents –  de son père alcoolique et violent il garde pas mal de cicatrices sur son corps, et de sa mère dépressive le traumatisme d’une enfance difficile – , Wellington (dans le rôle, Joao Petro Mariano, lauréat d’un casting sauvage) se retrouve sans feu ni lieu. Il renoue dès lors avec son ancien univers queer – drag queens, performeurs de voguing…  – dans les quartiers interlopes de Sao Paulo, cette mégalopole de 20 millions d’habitants dont ce délinquant gay aux lèvres pulpeuses et au sourire de gosse connaît les ressources comme sa poche. Dans un ciné porno où le garçon et sa petite bande de folles sont entrés pour subtiliser leurs smartphones aux clients distraits, le hasard s’invite à lui sous la forme d’une rencontre avec le viril Ronado (Ricardo Teodoro), un dealer-prostitué d’âge mûr, qui le prend bientôt sous son aile, selon le mode du donnant-donnant, l’hébergeant dans son gourbi contre de menus services, comme de livrer la came à ses clients.  

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Bonne école de dissimulation, la prison a appris à Wellington, alias Cleber, à mentir sur tout, à commencer par son prénom. Finalement, ce sera « Baby ». S’ensuit, dans les marges de Sao Paulo, une romance farouche, assez crue, entre l’ainé et le cadet en quête de familles d’adoption, pour tenter de survivre entre drogue et prostitution. Un micheton des beaux quartiers s’éprend de Baby jusqu’à lui offrir des fringues et un iPhone, mais sur le point de l’emmener en voyage à la découverte de Rio, il le largue à l’instant même où il pige que son protégé est un gentil voyou.

« Baby », un film de Marcelo Caetano, 2025 © Epicentre Films

La relation heurtée, conflictuelle, avec l’égoïste et possessif Ronaldo, dessine un mélo que d’aucuns jugeront à la fois sulfureux et complaisant. Dans son réalisme brut, le second long métrage de Marcelo Caetano a pourtant le mérite de brosser un « portrait de ville » authentique, dans sa noirceur sordide autant que dans ses charmes vénéneux. Souvent tournés en caméra cachée dans son propre quartier, les extérieurs de Baby dévoilent les bas-fonds de la ville selon un vérisme quasi-documentaire. Il n’est pas indifférent que Marcelo Caetano, natif de Belo Horizonte et anthropologue de formation, ait travaillé naguère aux côtés de l’excellent cinéaste Kleber Mendonça Filho, dont le film Aquarius (2016) figurait quant à lui, sous le masque de la fiction, une remarquable peinture de la ville de Recife, suivi en 2019 par Bacurau, Prix du Jury à Cannes cette année-là, un très étrange thriller d’anticipation qui avait pour toile de fond le Sertao brésilien. Tous deux ont été distribués en France ;  on peut encore les trouver en DVD. Autant dire que Caetano a été à bonne école.            


Baby. Film de Marcelo Caetano. Avec Joao Pedro Mariano et Rirardo Teodoro. Brésil, France, Pays-Bas, couleur, 2024. Durée : 1h47

En salles le 19 mars

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