François, pape des pauvres et des polémiques, est mort
Souverain pontife depuis 2013, François a suscité bien des indignations. Le « pape des progressistes » a défendu l'immigration, dénigré le monde occidental, soutenu activistes et ONG… Mais il est mort ce lundi de Pâques. Selon Paul Rafin, l'heure n'est pas à la polémique mais à l'oraison... L’article François, pape des pauvres et des polémiques, est mort est apparu en premier sur Causeur.

Souverain pontife depuis 2013, François a suscité bien des indignations. Le « pape des progressistes » a défendu l’immigration, dénigré le monde occidental, soutenu activistes et ONG… Mais il est mort ce lundi de Pâques. Selon Paul Rafin, l’heure n’est pas à la polémique mais à l’oraison.
Une tristesse commune émeut l’univers ; c’est la force du catholicisme, cette grande religion traditionnelle, d’avoir uni — comme le judaïsme — les hommes par des liens supérieurs et qui les rassemblent, l’Évangile, la messe, le Pape ; et c’est bien la puissance du christianisme d’avoir étendu ces liens aux « Gentils », c’est-à-dire à tous les hommes de l’univers. Le pape n’est-il pas pour les chrétiens, pour tous les chrétiens catholiques, quels que soient leurs désaccords avec lui, le chef de la foi religieuse ? — sans cette verticalité nécessaire, il y aurait autant de sectes nouvelles que de mécontents, et c’est tout l’édifice qui s’effondrerait.
D’un bout à l’autre du monde, donc, on pleure ce pape dont la figure avait je ne sais quoi de sympathique, source inépuisable d’anecdotes étonnantes et toujours amusantes, que l’on disait proche des pauvres et qui l’était en effet, par ses actes autant que par ses paroles. Les Deux Papes, le film de Fernando Meirelles, n’avait pas peu contribué à sa popularité ; popularité qu’il avait déjà gagnée par son évidente humilité, par son amour hors du commun de l’humanité, par son goût non affecté, mais très sincère, pour le football (il était Argentin !), enfin par ce regard espiègle bénit du Seigneur qui donnait irrésistiblement envie de le suivre dans sa foi : il avait toujours l’air heureux.
Jean-Paul II l’avait fait cardinal ; François l’aura au moins égalé en réputation, et laissera lui aussi pour l’histoire le souvenir d’un homme simple et modeste, dont la vie fut comme une illustration des enseignements du Christ. Il faisait avec Benoît XVI, son prédécesseur, un contraste qui n’a pas manqué de soulever les indignations des pratiquants traditionnels. Moi-même, j’ai pu le qualifier de « pape des progressistes ». Mais quoi ? il défendait l’immigration, adressait aux fidèles des encycliques écolo-socialistes, invitait aux synodes les activistes des ONG ; on l’accusait d’être marxiste, il devait s’en défendre (!) ; pire, il s’attaquait aux messes tridentines et à la tradition.
Mais l’heure n’est pas aux médisances ; elle est à l’oraison. Alors, au risque de choquer, j’oserai dire que ce pape avait raison, lorsqu’il dénonçait les mensonges des fanatiques de la « vraie Église ». Le christianisme repose en effet sur un double paradoxe que même ses plus zélés défenseurs ont bien de la peine à justifier : il est né de la soumission au temporel par la pratique de la prière intérieure (Rendez à César ce qui est à César) et l’abolition du rite jugé hypocrite (« On chercherait vainement dans l’Évangile, écrivait Renan à ce propos, une pratique religieuse recommandée par Jésus. Le baptême n’a pour lui qu’une importance secondaire ; et quant à la prière, il ne règle rien, sinon qu’elle se fasse du cœur ») ; en même temps, il s’est fortifié dans sa matérialité par sa puissance terrestre, par sa lutte contre le temporel, par l’établissement puis la persistance de ses rites. Dilemme d’une religion de l’humilité dont l’adversaire est la vanité, et qui domine le monde ! Face à cela, les uns privilégient une lecture fidèle des Évangiles, lesquels, à les lire sans mauvaise foi, délivrent un message humaniste, universaliste, abolitionniste ; les autres, sans les renier (notamment dans les vertus individuelles qu’elles exaltent), les interprètent volontiers librement dès qu’il s’agit de soutenir des réalités. Le pape François aimait les Évangiles pures, dépouillés de leurs exégètes pharisiennes : et cela démontre qu’il était un homme de cœur. Hélas ! qu’aura été la sanction de cette politique ? la poursuite d’une déchristianisation massive des sociétés occidentales (la récente hausse des baptêmes, en France, ne compense pas l’hémorragie enregistrée depuis un demi-siècle) ; au contraire, un regain des pratiques traditionalistes, par réaction, peut-être, à l’islamisation de la société tout droit venue de l’immigration. Le prochain pape aura le choix entre poursuivre la révolution, ce retour éthéré à la parole christique qui fut toujours et la gloire et l’inconscience de l’Occident, ou prendre à bras-le-corps ces réalités qui font que l’histoire est tragique.
François est mort pendant les fêtes de Pâques, les plus importantes chez les chrétiens, celles qui célèbrent la résurrection du Christ : son rappel à Dieu, à cette date magnifique, paraît une preuve de sa divine élection. Il n’était pas le Christ : il ne reviendra pas ; mais il était plein de vertus, sensible et bon : nul ne doute qu’il trouvera sans peine les portes du Paradis, ce baiser de Dieu — et qu’il y sera accueilli dans la Lumière, lui qui, connaissant Jésus, ne craignait plus la mort.
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