Fame, je vous aime !
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Chaque semaine, Philippe Lacoche nous donne des nouvelles de Picardie…
Ma chérie, la Sauvageonne, a du goût. Il y a peu, elle m’a entraîné au cirque Jules-Verne d’Amiens pour assister au spectacle Fame TV, du collectif TBTF (Too Busy To Funk), organisé par la Comédie de Picardie, dirigée avec goût et audace par Nicolas Auvray.
Dans une mise en scène de Ricardo S. Mendes (également jongleur), la création propose plusieurs disciplines : aérobic, cerceau aérien, corde lisse, acrobatie, et, bien sûr, musique à gogo. On se régale ; c’est fou, complètement cintré ; on baigne dans une eau de joie simple, pétillante et limpide comme un étang de Pilsen. Le monde de la télé crève l’écran pour rendre visite au monde de la réalité. L’univers de la télévision des seventies est passé en revue ; tout le monde sort de la boîte et déboule sur la piste du cirque pour la transformer en plateau vif comme un chevesne ardéchois. On a le droit aux variétés, aux publicités d’antan, aux héros de séries délicieusement désuètes, à des extraits de débats (les clins d’œil au Parti communiste et à Georges Marchais faisaient un bien fou !). Un présentateur nombriliste, des vedettes de la chanson française, la speakerine figée dans les années 70. Tous des manières de fantômes bienveillants. Surviennent des incidents ; les prises de vues se superposent, se chevauchent dans un joyeux bordel au son d’un trio de musiciens remarquables d’agilité et de précision (clavier, basse et batterie). Ah ! ce bassiste – Pablo Fraile – au jeu d’une inventivité est d’une souplesse à tomber. Un bassiste à cinq cordes, les quatre de sa basse et celle, lisse, qu’il attrapa un peu plus tard pour s’adonner à de vertigineuses acrobaties. Certains artistes fument sur la piste (ou, plutôt, font semblant ; sécurité oblige) comme ça se faisait avant sur les plateaux télé. Et comment résister aux chansons de Boris Bouchard (interprétées par le sympathique et si talentueux Simon Tabardel), de Périgueux, chanteur débutant propulsant trois bluettes acidulées : « J’ai fait un rêve », « J’avais envie » et « Les amants saisonniers » ?
Tout y était : les textes d’amour vanillés, les poses (têtes renversées), les intonations déchirantes (à la Frédéric François) et le duo avec la chanteuse vedette surnommée Florence Pommier. Le public reprenait les mélodies en chœur ; ma Sauvageonne et moi chantions à tue-tête, complètement déchainés. Nous n’avons pas pu résister et nous sommes mis à hurler « Bouchard ! Bouchard ! Bouchard ! » à plusieurs reprises jusqu’à ce que nous attirions son attention et qu’il se mît à nous repérer, puis nous regarder, puis nous faire signe. Tous deux, nous étions fans. À la fin du show, il a proposé qu’on se retrouve à la buvette. Autour d’une bière, il nous raconta qu’il venait du rap et d’Ardèche, que le collectif était suisse et regroupait une vingtaine d’artistes circassiens issues d’écoles de cirque (dont celle de Lyon et de Sainte-Croix) ; en janvier 2022, la troupe a posé ses bagages à La Cascade-Pôle national Cirque à Bourg-Saint-Andéol, en Ardèche. C’est là que Simon les rencontra et endossa l’habit de lumière de Boris Bouchard. Pour le plaisir de tous. Un spectacle positif, vivifiant et fichtrement réussi. Que du bonheur !
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