Du podium à la piste : le sport, nouveau terrain du luxe
Après les prairies verdoyantes, les cimes escarpés et l’appel du grand air, place à la sueur, l’esprit du collectif et les matières techniques. L’industrie du luxe vit une transformation culturelle : longtemps associée à un univers urbain et sophistiqué, voici … Continuer la lecture → The post Du podium à la piste : le sport, nouveau terrain du luxe first appeared on La Réclame.


Après les prairies verdoyantes, les cimes escarpés et l’appel du grand air, place à la sueur, l’esprit du collectif et les matières techniques. L’industrie du luxe vit une transformation culturelle : longtemps associée à un univers urbain et sophistiqué, voici qu’elle s’acoquine de plus en plus avec le monde du sport. Ce n’est plus un frémissement depuis quelque temps déjà, mais une véritable lame de fond. Après l’outdoor, nous analysons ce phénomène plus général avec Damien Bettinelli, co-fondateur et producteur de l’agence Les Others Studio, qui sort le livre blanc, « Game Changers – Comment le sport infuse la culture et pourquoi le luxe peut s’en inspirer ».
Le sport est devenu une force culturelle globale, bien au-delà des terrains et des stades. Ce qui s’impose comme une évidence aujourd’hui était jadis rattaché à des sous-catégories, comme le surf ou le skate. Ces sports ont été parmi les premiers à développer une véritable aura culturelle et des communautés d’affidés en dehors de la performance pure. Elles charriaient un lifestyle, une énergie, une philosophie. Des films comme Point Break (de Kathryn Bigelow) et Bodhi, incarné par Patrick Swayze, Kids (Larry Clark) ou Les Seigneurs de Dogtown (Catherine Hardwicke) ont largement participé à construire cet imaginaire. Ce n’était plus juste du sport, c’était de la contre-culture. Un cri de ralliement.
Cela s’observe très nettement sur l’outdoor avec l’essor de l’escalade, de la randonnée ou du trail — mais aussi sur le running, qui est devenu une véritable culture en soi. On parle ici de sport comme mode de vie, comme expression de soi. C’est un phénomène qui a explosé ces deux dernières années.
Pour reprendre une citation du réalisateur Spike Lee, issue d’une interview parue dans le magazine L’Étiquette Homme n°13, à qui on demandait quelle était la force des vêtements de sport à ces yeux : “Ils ont une puissance tribale (…) Les maillots de sport disent d’où l’on vient.”
Le sport s’impose aujourd’hui comme une source d’inspiration majeure pour les industries créatives – de la mode à l’art, en passant par la musique, les médias et désormais… le luxe. L’omniprésence du sport dans notre quotidien s’est encore renforcée avec les Jeux Olympiques de Paris 2024, dont l’impact dépasse largement la seule performance sportive. Le groupe LVMH ne s’y est pas trompé en devenant “l’artisan de toutes les victoires” en tant que sponsor premium des Olympiades parisiennes.
“Le sport est devenu un moteur culturel. Il partage avec le luxe des valeurs comme la performance, l’excellence et la rareté, confirme Augustin Pénicaud, vice-président d’Havas Play dont l’agence a accompagné LVMH durant les Jeux. Mais ce qui les rassemble le plus, c’est à mon sens la créativité. Celles des artisans et des athlètes.”
Comme il le rappelle justement, “les athlètes sont aussi des icônes de style, renforçant le lien entre les deux mondes. L’essor du streetwear, inspiré par le sport et adopté par le luxe, illustre bien cette porosité.”
Trois exemples illustrent selon lui cette dynamique :
– LVMH a choisi Léon Marchand comme ambassadeur pour Paris 2024, “incarnant l’excellence et le dépassement de soi” ;
– Gucci a collaboré avec la NBA pour une collection capsule, fusionnant sport et luxe en 2020 (Louis Vuitton également).
– Le PSG a multiplié les collaborations avec des marques de luxe comme Dior et Jordan (la récente collection luxe “Wings”), fusionnant performance sportive et élégance.
Le sport porte aujourd’hui des récits puissants : dépassement de soi, émancipation, collectif, diversité. Autant d’éléments qui entrent en résonance avec les attentes d’une nouvelle génération de consommateurs en quête de sens, d’authenticité et de représentation.
Ce glissement du sport vers la culture populaire s’accompagne d’un brouillage des frontières entre sport et mode. Des figures comme Jules Koundé ou Kim Ye-ji, la tireuse sud-coréenne remarquée aux JO, incarnent cette convergence : un style technique, sportif, mais aussi pointu, voire high fashion. La montée des tendances “core” est un signe supplémentaire, qu’il s’agisse du gorpcore, le balletcore ou le blokecore, des maillots de foot vintage ou encore des écharpes de supporters. Des marques comme Salomon ou Hoka, autrefois confidentielles, sont désormais omniprésentes dans les villes.