Ces vestiges multicolores à 30 min de Lille cachent l’histoire d’un palais disparu digne du Taj Mahal

Nous sommes au sein du quartier Blanc Seau, à Tourcoing. Entre des habitations typiques, notre regard est immédiatement attiré par deux petits pavillons multicolores. Toits arrondis, tuiles en formes d’écailles… On ne se croirait pas dans les Hauts-de-France. Eh bien, justement. Il faut croire que l’ancien riche propriétaire fantasque dont nous allons vous conter l’histoire avait d’immenses envies d’ailleurs…

Un palais disparu

Avant d’évoquer le palais digne du Taj Mahal, il faut absolument que vous fassiez connaissance avec le personnage principal de ce projet fou. Pour ce faire, cap en 1883. À cette époque, Victor Vaissier vaquait des jours heureux grâce à son entreprise familiale florissante. Son produit phare était le savon du Congo : un projet industriel qui le rendit plus que fortuné. Vous vous en doutez, ces savons étaient vendus en faisant miroiter un « exotisme » qui serait absolument scandaleux aujourd’hui. En tout cas, on ne peut pas retirer à Monsieur Vaissier son excellence dans les affaires qui lui permit de vivre très (très) confortablement durant plus de 20 ans.

Puisque l’entrepreneur désirait une habitation à son image, c’est-à-dire novatrice et unique, il a acheté un terrain. Et pour orner ce terrain, il a commandé un palais exubérant. À l’époque, on nommait cette curiosité gigantesque le « château du Congo », pourtant, il n’avait absolument rien avoir avec ce pays d’Afrique !

Taj Mahal des Hauts-de-France

Victor Vaissier désirait ni plus ni moins qu’un « château somptueux, majestueux et original, reprenant la forme et le style oriental ». L’architecte en chef, Édouard Dupire-Rozan, ne prit pas les demandes de son client à la légère. Le palais inouï fut érigé en 1892, mais vous le constatez : il se rapproche davantage du Taj Mahal et de l’art indien, que du Congo. Pas de panique, pour Victor Vaissier, tout avait un sens !

Figurez-vous qu’en visitant l’exposition universelle de 1889, l’extravagant entrepreneur est resté bouche bée. Les pavillons incarnant différents pays redoublaient d’originalité et de couleur : c’est exactement ce qu’il lui fallait. Qui sait, peut-être a-t-il eu la possibilité d’admirer le Pavillon des Indes ! Et pour tenter de rester dans le thème, il ajoutera que l’Inde et le continent africain ont un point commun : les éléphants. D’ailleurs, le palais sera décoré de 4 éléphants monumentaux.

Imaginez un escalier gigantesque de marbre rouge, un palier éclairé par des vitraux colorés et des espaces immenses à en perdre la tête ! Bien sûr, des toits de bulbes furent installés. Ce palais absolument fou était, pour Victor Vaissier, le reflet de son ambition sociale. Alors il fallait autant en parler que ses « savons du Congo ». C’est pour cela qu’il nous reste des images, car des séries de cartes postales avaient été créées pour l’occasion.

C’est malheureusement le seul souvenir qu’il nous reste de cet immense Taj Mahal du Nord.

Vestiges multicolores

Cette folie des grandeurs colorée a duré jusqu’à la mort de Victor Vaissier. En 1929, le palais est malheureusement démoli par un propriétaire qui ne semble pas être d’humeur patrimoniale. Les différentes parcelles du terrain sont alors vendues, et le tout est relégué aux souvenirs. Aujourd’hui, vous pouvez encore admirer les pavillons du concierge et du jardinier, qui donnent un aperçu de ce qu’était l’immense palais Vaissier, ou « château du Congo ». Se dire que presque tout a été démoli peut sembler scandaleux, mais tout dépend du contexte, et de l’époque ! Par chance, l’histoire de ce Taj Mahal insolite demeure, alors le plus important est de lui rendre hommage.

Pavillons du concierge et du jardinier, 20 rue de Mouvaux, 59200 Tourcoing

Lille Europe > Trois Suisses (30 min)

Photo à la une : Maison du concierge et du jardin, vestiges du palais Vaissier © @catfish.architecture