Ce train vintage, entre fusée et avion, aurait pu relier Lyon à Paris en 1h10
C’est un élément qui pourrait passer inaperçu, mais qui cache une fascinante histoire de l’industrie des années 60 et 70. Après avoir quitté la région parisienne pour prendre la direction d’Orléans, on peut remarquer, en empruntant la D2020 ou l’A19, une sorte de viaduc en béton, coupé net au niveau de l’autoroute, et qui s’étend […]

C’est un élément qui pourrait passer inaperçu, mais qui cache une fascinante histoire de l’industrie des années 60 et 70. Après avoir quitté la région parisienne pour prendre la direction d’Orléans, on peut remarquer, en empruntant la D2020 ou l’A19, une sorte de viaduc en béton, coupé net au niveau de l’autoroute, et qui s’étend sur plusieurs kilomètres. S’il fait aujourd’hui le bonheur des plantes sauvages ou des graffitis, cet édifice devait à la base être le terrain d’un projet futuriste : l’Aérotrain.
Un projet à mi-chemin entre le train, la fusée et l’avion
Encore méconnu du grand public, l’Aérotrain est un rêve éphémère, né dans l’esprit de l’ingénieur Jean Bertin. Ce polytechnicien, diplômé de l’école nationale supérieure de l’aéronautique, n’hésite pas à transposer ses découvertes d’un secteur à l’autre, et c’est ainsi qu’il affuble sa carlingue sur coussin d’air d’une hélice d’avion, et qu’il parvient à lui faire atteindre des records de vitesse sur un rail central. Pendant les années 60, son équipe et lui développent un concept de véhicule sur coussins d’air, guidé par un rail de béton. Allure futuriste, propulsion novatrice, turbines d’avion : l’Aérotrain semble tout droit venir du futur, et fait logiquement rêver. Une première voie d’essai est construite à Limours dans l’Essone, avec deux véhicules à l’échelle 1/2. Puis une deuxième, grandeur nature, flottant sur de hauts piliers de béton à travers la Beauce pendant 18 km, le long de la ligne de chemin de fer, à quelques kilomètres au nord d’Orléans. La première maquette est présentée au Premier Ministre, Georges Pompidou, en 1963. Deux ans plus tard, le prototype 01 glisse à 90 km/h, puis 200 et même 300 en 1966. Une voie d’essai apparaît alors dans l’Essonne, se terminant à Gometz-la-Ville. En 1969, le prototype 02 culmine à 422 km/h, avant d’être dépassé par le I80-HV et ses 430,4 km/h le 5 mars 1974, soit le record mondial de l’époque. Un record qui sera même homologué par l’aéroclub de France, qui a fait le déplacement pour l’occasion.
Un projet finalement éclipsé par l’essor du TGV
Ce qui était un projet fou devient alors le moyen de transport sur rail le plus rapide, et le restera pendant 5 ans jusqu’à l’avènement du train magnétique au Japon. Surtout, avec l’Aérotrain, l’univers du transport aurait été totalement bouleversé : Orléans étant accessible depuis Paris en 20 minutes. En se basant sur ce calcul, Lyon aurait ainsi été accessible depuis Paris… en seulement 1h10. Première étape d’un nouveau réseau permettant de relier la capitale aux agglomérations distantes de moins de 200 km à des vitesses jamais atteintes, l’aérotrain devait même devenir un mode de transport périurbain. L’intérêt autour de ce projet était tel qu’une vingtaine de pays, dont les États-Unis, s’intéressaient à cette fusée terrestre tricolore. Mais deux facteurs vont entraîner le non-aboutissement de l’Aérotrain : le développement du TGV, où les industriels réalisent que ce dernier pourra atteindre les mêmes vitesses que son concurrent en utilisant le réseau ferré déjà construit, et la mort du Président Pompidou en 1974, fervent défenseur du projet. À peine quatre mois après sa disparition, le gouvernement annonce discrètement l’abandon du projet. Une décision appuyée par le successeur de Pompidou, Valéry Giscard d’Estaing, qui est plus attaché au TGV car celui-ci présente l’avantage de fonctionner à l’électricité, alors que la propulsion des aérotrains utilise bien souvent des hydrocarbures.
Aérotrain Interurbaine 80 a Orleans @ Jean Bertin. pic.twitter.com/xiXTybWBAI