La franchise résiste-t-elle mieux aux crises ?
La franchise surmonte mieux les crises que les autres modèles. Les chiffres l’attestent, mais ne prennent pas en compte son taux de survie à dix ans, ni sa dépendance à certains secteurs d’activité.


La franchise surmonte mieux les crises que d’autres modèles d’entreprise. Les chiffres l’attestent : le chiffre d’affaires des franchises progresse de 15,5 %, contre 7,7 % pour les autres. Cependant, ils ne prennent pas en compte le taux de survie à dix ans, le renouvellement des structures ni la dépendance du modèle à certains secteurs d’activité.
« Dans un contexte de crise sanitaire ayant marqué l’année 2020, le modèle de la franchise apparaît comme un refuge pour les franchisés. 67 % estiment en effet avoir mieux résisté à la crise en tant que franchisés plutôt qu’un commerçant indépendant. » C’est que souligne l’enquête sur la résilience du modèle des franchises, quelles que soient les crises successives, financières – 2008 – ou sanitaires – Covid-19.
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Les franchises sont un système complexe caractérisé par une relation dyadique franchiseur-franchisé. En corollaire : le droit d’utiliser son enseigne, sa marque, son savoir-faire ou le droit de commercialiser des produits ou services. L’Insee abonde dans le sens de la Fédération française de la franchise (FFF). Les chances de survie d’une entreprise sont de 5 ans supérieures lorsqu’elles sont créées sous l’égide d’un réseau (74 %), contre 58 % hors réseau. La franchise est présentée comme une voie privilégiée d’entrepreneuriat.
Cependant, les théories fondatrices et les résultats de travaux empiriques centrés sur la performance des systèmes de franchise nuancent cette résilience structurelle, notion exacerbée par les crises. Alors, la franchise serait-elle régie par une homéostasie (capacité d’un système à maintenir l’équilibre de son milieu intérieur) favorable à la résilience organisationnelle ?
Croissance en hausse, survie en berne
Les données ci-dessous soulignent une progression du nombre de franchiseurs et points de vente, ainsi que du chiffre d’affaires réalisé par le commerce et les services sous ce format. Les crises successives de 2008, financière, et de 2020-2021, sanitaire, ne semblent pas infléchir significativement la pente de cette progression. Elles sont de nature à accréditer l’existence d’une résilience globale de la franchise, si l’on se limite à ces données.
On pourra toutefois nuancer cette appréciation par une prise en compte plus sectorielle de ces tendances. Ces chiffres ne renseignent pas l’évolution de la part de marché de la franchise dans l’ensemble du commerce de détail et des services. Ces indicateurs de performance traduisent un solde d’opérateurs, franchiseurs et franchisés, sans rendre compte du taux de renouvellement des enseignes ou de leur taux de survie.
On ne peut exclure que cette dynamique globale favorable soit obtenue au prix d’un certain taux de renouvellement des enseignes en franchise. Ce résultat est à rapprocher d’une donnée : seul un réseau sur trois survivrait au-delà d’une dizaine d’années. Comme le souligne Rozenn Perrigot, la mixité, la taille, l’origine nationale et l’internationalisation du réseau sont des facteurs influençant positivement sa survie.
Investissements ne signifient rentabilité
L’option franchise est historiquement étudiée dans sa dimension financière. Le recours à la franchise par les têtes de réseaux relève principalement de la théorie de « la rareté des ressources ». Il est lié au besoin du franchiseur de trouver certaines ressources rares, telles que les ressources financières ou la connaissance des marchés visés, mais aussi les compétences et la disponibilité des opérateurs locaux. De facto, un « levier financier ».
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Certains travaux empiriques, notamment ceux initiés par la Fédération française de la franchise (FFF), relativisent considérablement ce point. Le modèle des franchises n’assure pas automatiquement la croissance de l’entité franchisante et une rentabilité financière durable. Un autre enseignement : l’échec de la franchise en Grande-Bretagne repose notamment sur le risque d’inadéquation structurelle entre les investissements immédiats pour assurer la fonction franchise et les profits escomptables du réseau.
Des secteurs d’activité précis (comme la restauration rapide)
Plus récemment des travaux concluent de façon très nuancée sur la rentabilité économique et financière des franchises. Il apparaît en effet que les réseaux franchisés dégagent en moyenne une rentabilité économique supérieure à celle des succursalistes dès lors qu’ils sont composés de plus de 75 % d’unités en franchise.
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Ceci sous deux conditions : que la franchise s’exerce dans un environnement dynamique caractérisé par des ruptures et dans un secteur qui l’a massivement adoptée. Un secteur d’activité emblématique : la restauration rapide. Une rupture : la livraison à domicile pendant la pandémie de Covid-19.
En revanche, la supériorité d’une rentabilité financière de la franchise par rapport au succursalisme n’est pas établie. Elle invalide le mythe du levier financier en mettant en question l’existence d’une capacité de résilience propre à la franchise.
Ce constat empirique invalide ainsi le mythe du levier financier et remet en question l’existence d’une capacité de résilience propre à la franchise.
Saloua Bennaghmouch ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.